Discours d’Alain Jouannet, président de la Libre Pensée 37 en hommage à René Abel Viau, soldat fusillé pour l’exemple en décembre 1914
Fédération d’Indre-et-Loire de
la Libre Pensée
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Discours d’Alain Jouannet, président de la Libre Pensée 37, le 10 novembre 2016 au cimetière de Bléré pour l’apposition de la plaque en hommage à René Abel Viau, soldat fusillé pour l’exemple en décembre 1914
Nous sommes réunis ici en ce jour du 10novembre 2016 à la veille des cérémonies officielles pour rendre hommage au soldat René Abel Viau, né à Bléré en 1888 et fusillé pour l’exemple en 1914 à Ypres en Belgique.
Nous, Libres Penseurs, nous demandons que les 650 fusillés pour l’exemple soient réhabilités collectivement.
Les descendants, les républicains et, plus largement, tous ceux qui sont attachés à la justice, attendent réparation et que justice leur soit enfin rendue.
Ils n’étaient ni des traitres, ni des lâches. C’est maintenant un fait historique reconnu par les archives de l’armée elle-même, par son service historique, et par les procès-verbaux des conseils de guerre.
C’est un fait établi : en 4 ans de conflit, 195.000 soldats, dont 35.000 officiers eurent affaire à la justice militaire ! Pas un seul général n’a eu à répondre de ses actes qui coûtèrent la vie à tant d’hommes lors d’attaques et de prétendues offensives vouées par avance – vu les conditions – à l’échec. Le plus illustre étant Nivelle.
6000 soldats furent traduits devant les conseils de guerre d’exception, 2400 furent condamnés à mort ou peines commuées au bagne, 650 environ furent fusillés pour l’exemple devant les troupes rassemblées comme en attestent les procès-verbaux des exécutions.
Parmi les fusillés pour l’exemple, 50 ont été Réhabilités dans les années 20 (Blanche Maupas, son combat…). René Abel VIAU, comme d’autres dans les régions voisines, a été fusillé.
Contrairement à une idée répandue, ce n’est pas en 1917 au moment des mutineries ou des fraternisations, mais dès 1914 que de nombreux soldats comme René Abel Viau ont été exécutés.
Aujourd’hui, nous lui rendons hommage !
Je voudrais, au nom de la Libre Pensée qui mène ce combat depuis des années et des années, parfois avec d’autres associations comme la LDH et l’ARAL, je voudrais remercier la mairie de Bléré, son maire, ses adjoints et tout son conseil municipal et tous ceux qui sont rassemblés ici aujourd’hui pour l’apposition d’une plaque en hommage à René Abel Viau.
En faisant cela, la commune fait œuvre de justice.
En faisant cela, c’est la justice et la République que la mairie défend.
En faisant cela, elle réhabilite le soldat fusillé pour l’exemple né dans la commune.
La République ? C’est nous les citoyens ! La République, c’est la commune qui en est la base depuis la Révolution française. Encore une fois, merci !
C’est ce que devraient faire les autorités au plus haut sommet de l’Etat, à commencer par le président de la République…
Président de la Corrèze, François Hollande avait fait voter une délibération du Conseil général demadant la réhabilitation des fusillés pour l’exemple. Président de la République, l’a-t-il oublié ou s’est-il parjuré ?
Vous devez savoir que plus de 200 communes ont adopté des délibérations exigeant la réhabilitation des fusillés pour l’exemple, 4 dans notre département ; 3 conseils régionaux, 20 conseils départementaux.
M. Hollande prononcera-t-il avant la fin du quinquennat le mot « réhabilitation » ? Déclarera-t-il qu’ils n’étaient pas coupables, comme c’est maintenant reconnu ? Ils étaient innocents des crimes qu’on leur a attribués. Il faut les réhabiliter ! Sarkozy a parlé des fusillés, mais il n’a pas prononcé le mot de réhabilitation. Hollande le fera-t-il ?
Nous avons un devoir de mémoire. C’est le centenaire de cette guerre qui fut une véritable boucherie :
- 900 tués par jour pendant 1560 jours, 4 ans et 100 jours.
- France 1,4 million de morts, 3 millions de blessés, 600.000 amputés ;
- Allemands 1,8 million, Russes 1,7 million, Italiens 650.000, Britanniques 900.000 ;
- 700.000 veuves qui s’habilleront de noir pendant des années ;
- 760.000 orphelins ;
- 140.000 poilus gazés.
Nous avons retrouvé à ce jour, 100 ans après, une vingtaine de descendants de soldats fusillés pour l’exemple. Ces descendants viennent à notre initiative, Fédération Nationale de la Libre Pensée, de lancer un appel pour que la République réhabilite tous les fusillés pour l’exemple.
Nous avons un devoir de mémoire.
Aujourd’hui, nous nous souvenons à Bléré de ce fils de galochier né à Bléré le 12 juin 1888 qui a exercé le métier de boucher-charcutier à Bagnolet.
Nous nous souvenons de cet homme qui s’est engagé volontairement dans le 66ème régiment d’infanterie.
René Abel Viau a cherché un poste de secours. Il a été arrêté par les policiers et gendarmes, militaires recrutés en masse pour mater la troupe. Ils surveillaient partout les soldats, au front, dans les cantonnements, dans les gares, dans les villes.
René Abel Viau est condamné pour abandon de poste lors d’un procès expéditif au cours duquel les témoins à décharge n’ont rien pu dire puisqu’ils n’ont pas pu y accéder.
Exécuté le lendemain. Le cynisme n’a pas de borne, le procès-verbal indique que l’exécution a coûté 12 francs ! Cet homme, engagé volontaire, est mort à 26 ans fusillé par des balles françaises.
Nous avons un devoir de mémoire. La justice doit être rendue. Aujourd’hui nous l’affirmons, la République, c’est nous. Nous les réhabiliterons. Nous faisons campagne pour lever les fonds nécessaires et trouver le terrain sur une commune de la ligne de front pour ériger un monument en pierre en hommage aux 650 fusillés pour l’exemple. C’est une information, mais aussi un appel…
Encore une fois merci à la municipalité de Bléré, merci à vous qui vous êtes déplacés et de nous avoir écoutés, et, pour ceux qui le veulent, rendez-vous cet après-midi – film et plus d’infos et exposition (modeste) et débat